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2016/01/25

Elizabeth J. Perry, "Red Literati: Communist Educators at Anyuan"

Billet de Sophie Gauthier

Elizabeth J. Perry, "Red Literati: Communist Educators at Anyuan, 1921-25," Twentieth-Century China 32.2 (April 2007): 111-134.

Elizabeth J. Perry (1948-) est professeure au département du gouvernement à l'Université Harvard, et directrice de l'institut Harvard-Yenching. Spécialiste de la politique chinoise, ses recherches actuelles portent sur la gouvernance culturelle et la politique de l'enseignement supérieur en Chine. Elle est aussi l'auteure de plusieurs ouvrages traitant des mouvements ouvriers et de la classe ouvrière chinoise à différent moments de l'histoire.
                                             
Dans son article, Perry  désire répondre à une question vaguement abordée dans le passé, mais pourtant essentielle pour comprendre la réussite de la révolution chinoise. Impressionnée par le fait que des éduqués intellectuels du Parti communiste chinois (PCC) aient rallié à leur cause et politisé des travailleurs analphabètes n'ayant jamais reçu quelconque éducation, Perry s'interroge sur la manière dont le PCC est parvenu avec succès à ce résultat. Elle déclare que la raison se trouve dans une stratégie du PCC, soit d'éduquer les travailleurs dans des écoles et d'autres institutions destinées à l'apprentissage. Cette position est un appui à celle de Stephen C. Averill (1945-2004), un professeur de l'Université d'État du Michigan qui travaillait sur le sujet avant son décès.

                                                    
Afin d'appuyer son affirmation, Perry regarde la montée du mouvement communiste à la mine de charbon d'Anyuan (Pingxiang, Jiangxi), où ce dernier fut l'un des plus enthousiastes dans les années 1920. C'est Mao Zedong qui, flairant le potentiel de cet endroit s'y rendit en 1921 pour discuter avec les travailleurs de la mine. Après avoir appris qu'ils n'avaient pas les moyens d'aller ou d'envoyer leurs enfants à l'école, Mao leur envoya un activiste nommé Li Lisan à qui il confia une mission. Selon une stratégie favorisée et déjà utilisée par le parti ailleurs au pays, Li devait d'abord fonder des écoles pour les ouvriers de la mine sous l'identité d'un maître d'école. Lorsque les gens le respecteraient comme professeur, Li pouvait commencer à enligner son enseignement vers une démarche davantage politique. Les écoles deviendraient progressivement des organisations syndicales avec comme membres non plus strictement des élèves apprenant à lire, mais davantage des militants actifs prônant la révolution.
Perry relate avec détails l'évolution de la mine en l'espace de quelques années. Le surnom qu'on finit par donner à la ville d'Anyuan, soit « Little Moscow », indique bien comment les efforts des activistes du PCC portèrent fruit. Éduquant d'abord les enfants le jour, Li Lisan et quelques travailleurs commencèrent à éduquer aussi des ouvriers adultes le soir. Les manuels scolaires officiels pour adultes étaient remplacés par des manuels édités par le parti, et Li discutait régulièrement de concepts marxistes-léninistes et du prolétariat en classe. À mesure que des nouveaux se joignirent aux cours, des travailleurs-étudiants eurent eux-mêmes l'idée de fonder un « club des travailleurs » (workers' club) après avoir lu dans un journal la création de ce genre de clubs à Shanghai, sans toutefois mentionner que ce nom inoffensif cachait une volonté d'agir visant à défendre leurs intérêts. Après une victoire résultant d'une grève non-violente en septembre 1922, le club des travailleurs afficha clairement sa tendance marxiste et le PCC souligna cet exploit prolétaire comme modèle à suivre.


Perry montre clairement la réussite du PCC à avoir formé à partir de rien une masse de fervents partisans détenant un minimum d'éducation. En septembre 1928, le Kuomintang nota sa difficulté à mener à bien la purge communiste à Anyuan. Il mentionna une « éducation rouge » (red education) comme étant la cause de cette résistance. Perry soutient qu'au lieu de renforcer la division entre la main-d'œuvre manuelle et celle intellectuelle telle que soulignée par Confucius, les membres du parti firent complètement le contraire en éduquant les masses ouvrières, un droit autrefois réservé à l'élite riche. Du côté des ouvriers, ceux-ci sautèrent sur cette opportunité et assimilèrent les principes révolutionnaires au fil de leur apprentissage de la lecture. De travailleurs analphabètes, ils devinrent de véritables leaders politiques sachant diriger les autres, tenir des discours et diffuser avec ardeur les principes marxistes-léninistes. Entre 1927 et 1930, plus de cinq milles travailleurs d'Anyuan ayant reçu l'éducation rouge joignirent les troupes de l'Armée populaire de libération.

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