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2015/02/08

The Hai-feng Peasant Association

Texte de Milan Bernard 

Péng Pài, « The Hai-feng Peasant Association », in Patricia Ebrey, ed., Chinese Civilization and Society:  A Sourcebook, New York, Simon and Schuster

L’auteur, Péng Pài (1896-1929), est un pionnier du communisme chinois, l’un des premiers à vouloir compter sur l’appui paysan, selon lui nécessaire au succès de la révolution en Chine.  Initié au socialisme agraire lors de ses études au Japon, il sera commissaire à l’éducation de Hǎifēng et organisateur de mouvements paysans. Cet extrait de ses écrits relate d’ailleurs ses tentatives de syndicalisation paysanne, de former chez eux une unité collective et une conscience politique. Membre de l’aile gauche du Guómín Dǎng, puis du Parti Communiste, il y assumera des fonctions importantes lors du début de la guerre civile. Il fonda et dirigea notamment le premier Soviet de l’histoire chinoise, à Hailufeng.  Par la suite, en 1928, il fut également membre du Politburo et Secrétaire responsable du mouvement agraire. Trahi par un de ses subordonnés, il fut emprisonné, torturé, puis tué sur ordre de Jiǎng Jièshí le 30 août 1929.  

Il s’agit d’une source primaire : c’est l’expérience même de Péng Pài qui est exposée, sur une période d’environ deux ans, soit le développement de son syndicat paysan. Suite à la perte de ses fonctions administratives en éducation et à des rivalités éditoriales avec le gouverneur, Péng relate son expérience de découverte de la ruralité chinoise et de la réalité paysanne, au nom de laquelle il réclamait parler. 



Il y eut un apprentissage pour passer son message : d’abord, il changea son apparence, pour ne plus paraître comme les oppresseurs, ainsi que son vocabulaire et son langage, dont le contenu se perdait lorsqu’il parlait aux paysans et finalement ses lieux de rencontre, non plus au village, mais à la croisée des chemins paysans. Au début, les premières victoires sont plutôt modestes : quatre et cinq paysans qui échangent, une douzaine de curieux. Peu à peu, ses discours prennent de l’ampleur, et si certains le prennent pour un fou, il réussit à mettre sur  pied un syndicat paysan qui comptera l’année suivante, en 1922, 500 membres, et en 1923, 20 000 membres au total et une juridiction de 100 000 personnes, avec de simples cotisations servant la publication de manifestes ou de pamphlets. Ces syndicalistes se réunirent en Assemblée, décidèrent de leurs orientations. L’organisation mit l’accent sur l’éducation paysanne et la santé, avec la mise en place d’un (essentiel) dispensaire, mais surtout sur les luttes de pouvoir, notamment par la prise de contrôle du marché de pommes de terre, permettant de financer les soins de santé. 

Péng Pài considère que la réussite, le succès est possible, réaliste, voire inévitable (dans un esprit marxiste révolutionnaire), malgré les embûches. Cela s’inscrit parfaitement dans la logique des maximes maoïstes: « Prendre sa résolution, ne reculer devant aucun sacrifice, surmonter toutes les difficultés pour remporter la victoire ».  L’effort de l’auteur est récompensé en ce sens par l’éveil progressif des paysans, et si les propriétaires terriens n’y croyaient pas, voyaient les développements et le discours de Péng Pai et de ses acolytes comme absurdes, ils ont vite été mis devant un fait accompli, la réussite de ces derniers. En effet, après les démonstrations de force, les slogans et l’organisation, 300 paysans venaient rencontrer le syndicat chaque jour, et il y eut 2000 nouveaux adhérents (et 400 dollars!) le jour du Nouvel An. 

The Hǎifēng Peasant Association est un compte rendu, semblant surtout servir comme contribution à potentiel politique. En effet, le texte donne une application pratique, couronnée de succès, des préceptes du socialisme agraire et l’on devine qu’il est encouragé de reproduire le processus. De plus, d’un point de vue contemporain, il exprime bien l’époque de croissance des idées associées au marxisme, bien avant que le Parti Communiste chinois ne prenne le pouvoir en 1949. Plus spécifiquement, il fait état des premiers balbutiements de la doctrine maoïste du potentiel révolutionnaire des masses paysannes, bien que cette idée soit présente dans les écrits associés aux mouvances anarchistes du début du XXe siècle. 

Contrairement au dogme classique du communisme, la paysannerie sera au cœur de la vision chinoise du marxisme et en restera un élément central jusqu’aux « Quatre Modernisations ». Il était même théoriquement considéré comme essentiel de vivre une expérience d’immersion rurale comme celle de Péng Pai pour devenir véritablement « rouge » : ce fut une justification à l’envoi des Gardes rouges dans les campagnes après la Révolution culturelle. 


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