Cliquez ici pour retourner au site web du cours

2015/02/15

A Defense of Humanism

Par Matthieu Daiki

Wang Ruoshui "A Defense of Humanism,", Contemporary Chinese Thought 16.3 (Printemps 1985): 71-88.  Texte original publié en 1983.

Wang Ruoshui est un philosophe et un journaliste, né en 1926 et mort en 2002. Il était étudiant en philosophie à l'université de Beijing dans les années 1940, études qu'il a interrompues pour soutenir le mouvement communiste en passe de prendre le pouvoir. Nommé éditeur du Quotidien du Peuple, organe de presse officiel du PCC, il fut un intellectuel reconnu, fidèle au régime, encensé par Mao lui-même, mais conservant tout de même une certaine indépendance d'esprit. Lors de cette décennie, on lui a demandé d'écrire un pamphlet antihumaniste. Après ses recherches sur le sujet, Wang finit par être convaincu que Marx lui-même était humaniste. C'est à la même époque qu'il découvre l'œuvre de Raya Dunayevskaya. Celle-ci développe le concept d'humanisme marxiste, repris par Wang dans son texte : "A Defense of Humanism". 

A une époque où il est de bon ton de réduire l'humanisme à une idéologie bourgeoise, Wang propose de déconstruire cet amalgame. Pour l'auteur, l'humanisme n'est pas en soi une idéologie bourgeoise, c'est une idéologie plurielle, donc adaptable au socialisme. Il montre enfin que Marx lui-même, dans ses jeunes années comme dans ses années de maturité, fut un humaniste. L'humanisme ne doit donc pas être réduit à une doctrine individualiste, mais peut être directement relié au projet socialiste. 


Wang Ruoshui admet qu'il existe un humanisme bourgeois mais affirme que cela ne saurait résumer l'humanisme. Pour lui, une idéologie comme le matérialisme, bourgeoise au départ, est devenue un pilier de l'idéologie marxiste. Ainsi, non seulement l'humanisme a connu un grand nombre de versions : Feuerbach voit l'aliénation de l'homme -et donc sa dégradation- dans la religion, tandis que Marx voit l'aliénation de l'homme certes aussi dans la religion mais avant tout dans sa dépendance vis-à-vis du système capitaliste. 

Si l'humanisme connaît autant de versions, c'est parce qu'il a au centre de sa vision du monde l'idée de ce que Wang appelle la "valeur humaine". Et toujours selon l'auteur, même le vieux Marx a continué à se prévaloir de la "valeur humaine", inséparable de la libération du prolétariat. Wang détruit ainsi tout un pan de la scolastique marxiste. 

Wang Ruoshui se propose donc d'abattre un lieu commun qui s'avère être un pilier de la Chine communiste d'après la révolution culturelle, où l'on a humilié et conduit à la mort des gens, en ne les traitant pas comme des humains mais en les renvoyant , pour paraphraser l'auteur, à leur origine sociale, à leur position dans la société ou à leur porte-monnaie. C'est à un coup d'éclat intellectuel auquel se livre Wang. C'est également une audace politique, en particulier dans la dernière partie du texte où il énumère les implications pratiques de ce marxisme-humaniste : Wang se positionne contre le culte de la personnalité, contre les purges de classes, mais aussi contre l'individualisme extrême et, finalement, en faveur d'un socialisme à visage humain. 

Si la position de Wang s'avère solide, on se demande tout de même si, à faire de Marx un humaniste, il n'agit pas comme Kang Youwei vis-à-vis de Confucius, dénonçant les universitaires pour mieux souligner la justesse du message originel. Comme Kang, Wang écrit à une période de profonds changements, d'où peut-être cette nécessité de faire du neuf en adaptant les vieux repères.  

No comments:

Post a Comment

Note: Only a member of this blog may post a comment.